C’est par un samedi nuageux et menaçant que plusieurs chevaliers et châtelaines chevauchent leur montures à la conquête de Château Gaillard commandité par JP en direction Les Andelys, commune du nord-est du département de l’Eure dans le bassin Seine Normandie encaissée dans la vallée du Gambon au cœur de l’une des boucles de la Seine.
Après avoir galopé à travers de petites routes de campagne au cœur du Vexin nos chevaliers atteignent une falaise située sur les hauteurs des Andelys où une charmante guide les attend revêtue de son Pancho antipluie rouge. Il faut dire qu’un de gros nuages bien sombres bien visibles de notre perchoir nous entourent accompagnés d’une bruine normande. Laissons nos montures se reposer et observons un instant ce beau point de vue s’offrant à nos guerriers. Les falaises de craie, dont certaines sont utilisées par des grimpeurs (varappe et escalade), sont parmi les plus hautes de la vallée de la Seine. Elles composent un paysage pittoresque (blancheur de la roche entourée d’une végétation très dense) au-dessus du fleuve et la boucle de la Seine dite Château-Gaillard, un magnifique panorama sur le château en ruine que nous allons visiter ensuite.
Entourant notre guide nous écoutons bien attentifs en pleine immersion visuelle l’histoire de Château Gaillard.
Richard installe le château sur un éperon rocheux dominant la Seine. Le système défensif dépassait de loin la seule forteresse encore visible aujourd’hui et bloquait littéralement le fleuve. Au pied du château, le bourg fortifié de la Couture (embryon du Petit Andeli) avait été créé. De là, un pont enjambait la Seine et prenait appui sur l’île fluviale dite du Château, qui accueillait un petit château polygonal (le château de l’île). Quelques centaines de mètres en amont du fleuve, une triple rangée de pieux empêchait la descente des navires (l’estacade). Deux mottes castrales servaient d’avant-postes : la tour de Cléry, sur le plateau, et celle de Boutavant dans la vallée, dont on peut encore voir quelques restes sur l’île La Tour. Au centre, poste d’observation magistral et imprenable, le Château-Gaillard. L’ensemble avait pour vocation de verrouiller la boucle de la Seine en amont de Rouen.
C’est ensuite à pied que nous empruntons un court moment la petite route bitumée en descente pour ensuite monter par de petits chemins escarpés à la queue leu leu parfois qui nous offrent par endroit une autre vue dominatrice sur Les Andelys et la boucle de la Seine. Nous voilà donc rendu au pied de ce monument après une bonne et belle balade à pied sportive. Arrivés au pied de ce monument notre visite sur site peut commencer ponctuée de plusieurs pauses en compagnie d’un beau soleil et commentée par notre guide. Les différentes parties du château se présentent au fur et à mesure de notre progression commentée par notre guide nous plongeant dans différentes époques bien tourmentées.
Château-Gaillard est en pierre (4700 tonnes) et se distingue par la complexité de son plan et ne ressemble pas aux forteresses construites ou améliorées dans la première moitié du XIIe siècle s’organisant en multiples volumes, emboîtés ou presque indépendants les uns des autres, stratégie multipliant les obstacles, épuisant l’assaillant, entravant la progression des machines et nécessitant moins de défenseurs.
Le donjon (8 m de diamètre et 18 m de hauteur), situé au sein d’une haute-cour constituant un refuge ultime au cœur de la forteresse est l’un des éléments les plus originaux et les mieux conservés. Il se présente sous la forme d’une tour circulaire sur les trois quarts. Sa partie supérieure a été arasée au XVIIe siècle. Le donjon comptait trois niveaux l’entrée se faisant par le premier étage via un long escalier de pierre aujourd’hui disparu et avait une fonction résidentielle en plus de son rôle défensif
La haute-cour, qui abrite le donjon, est entourée par une enceinte et un fossé externe et comportait également une grande salle, un four à pain et une armurerie. Des celliers étaient creusés dans la roche du fossé et pouvaient assurer le ravitaillement d’une garnison pendant deux ans.
La basse-cour englobe la haute-cour et son donjon. Elle était entourée d’un fossé sec équipé d’obstacles, surmonté d’un rempart et de tours, dont il ne reste plus grand chose. Une chapelle en pierre, côté falaise, et des bâtiments domestiques se trouvaient à l’intérieur.
L’ouvrage avancé défensif de forme polygonale est pourvue de flanquements circulaires et forme une partie quasi-indépendante du château puisque seul un pont mobile enjambant un fossé le reliait à la basse-cour. Il avait pour utilité de renforcer la défense du côté le plus vulnérable de Château-Gaillard (côté du plateau en surplomb) et servait aussi d’entrée au château, ce qui l’apparente à une barbacane.
L’ensemble des éléments du château sont isolés par un fossé.
Un puits de 120 mètres (20 m sous le niveau de la Seine) est creusé dans le sol calcaire de la basse-cour, tandis que des citernes stockent l’eau dans la haute-cour et l’ouvrage avancé. Des caves aménagées sous la basse-cour et accessibles par le fossé sud entourant la chemise assurent la conservation des denrées nécessaires pour soutenir un long siège.
La construction de Château Gaillard par le roi d’Angleterre et duc de Normandie, Richard Cœur de Lion, s’inscrit dans la lutte que se livrent, depuis les années 1060, les rois de France et les rois d’Angleterre, alors ducs de Normandie. À cela s’ajoute un conflit personnel entre Richard Ier dit Richard Cœur de Lion et le roi des Francs Philippe Auguste.
En 1189, Richard Cœur de Lion hérite des biens et possessions territoriales de son père Henri II Plantagenêt, partagés entre l’actuel territoire français et l’Angleterre. Le roi Philippe Auguste, jusque-là allié de Richard, s’éloigne peu à peu de lui, jusqu’à ce qu’ils se vouent mutuellement une haine féroce. Après quelques mois passés en Terre sainte, Philippe Auguste regagne son royaume et profite de l’absence de Richard pour entamer la conquête du duché de Normandie avec la complicité passive du propre frère de Richard, Jean sans Terre.
Dès son retour, Richard entreprend de récupérer la suprématie sur la frontière orientale de son duché de Normandie. Rouen se trouve directement menacée et il décide alors de construire en avant de Rouen, une grande forteresse pour barrer la rive droite de la vallée de la Seine et interdire le passage par voie fluviale en choisissant la couture d’Andely entre Vernon et Rouen, située à l’extrémité d’un important méandre du fleuve. Pour verrouiller la vallée de la Seine, outre la construction de Château-Gaillard, il fonde le bourg du Petit-Andely, fortifie l’île située au milieu du fleuve et barre le cours de celui-ci.
Après la mort de Richard Cœur de Lion en avril 1199, son jeune frère Jean sans Terre lui succède sur le trône ducal. Philippe Auguste, ayant conquis le Vexin normand à l’exception de Château-Gaillard, profite de cette succession pour relancer la conquête du duché de Normandie, reprend l’offensive en août 1203 et s’empare de l’île d’Andely (avec son fort) et du bourg de la Couture, abandonné par sa population. L’estacade est détruite, rendant la navigation sur la Seine possible. Plus loin, les Anglo-Normands abandonnent sans combat le château du Vaudreuil, puis c’est au tour du château de Radepont de tomber. La route de Rouen est alors ouverte pour les Français.
En septembre, Philippe Auguste entreprend le siège du château et la forteresse n’a plus guère d’intérêt stratégique tout autant pour le roi de France qui comprend la nécessité de l’abattre. Philippe Auguste entoure la forteresse d’un double fossé qu’il hérisse de 14 beffrois. Mais conscient du caractère redoutable de la forteresse, le roi de France compte surtout sur un blocus qui affamera la garnison et la population retranchées à l’intérieur pour soumettre Château-Gaillard.
Pour préserver les vivres, les 1 200 habitants de La Couture (Petit Andely) qui avaient trouvé refuge dans le château en sont chassés ensuite décembre. Après avoir laissé passer la plus grande partie, les assiégeants français repoussèrent le reste. Plusieurs centaines d’entre eux, tassés dans la deuxième enceinte, exposés au froid de l’hiver, mouraient de faim.
Mais ce n’est pas la famine qui assure au roi de France la prise de Château-Gaillard. Les Français attaquent d’abord la grosse tour qui domine l’ouvrage avancé. Son écroulement oblige les défenseurs à se replier dans le château proprement dit. La légende voudrait que les Français soient entrés dans la basse-cour par les latrines. Cependant ils se seraient introduits en réalité par l’une des fenêtres basses de la chapelle que Jean sans Terre avait fait construire bien mal à propos. Après avoir pénétré dans la chapelle, les assaillants débouchent alors dans la basse-cour et les défenseurs s’enferment dans le donjon. Comme un pont dormant relie la basse-cour au donjon, les mineurs français s’approchent facilement de la porte et un engin de jet l’enfonce. La garnison se rend le 6 mars 1204. Le roi a désormais le champ libre pour achever la conquête du duché de Normandie facilitée par l’abattement moral chez les Anglo-Normands. Le duché tombe entièrement en juin 1204.
Durant la guerre de Cent Ans (1337-1453) Château-Gaillard subit plusieurs sièges et tombe aux mains des Anglais au bout de seize mois de siège et ce parce que la dernière corde nécessaire à la remontée de l’eau du puits s’était rompue. C’était la dernière place forte normande qui résistait encore aux troupes anglaises d’Henri V.
La Hire, compagnon de Jeanne d’Arc, s’en empare par surprise en 1431 pour le compte des Armagnacs. En septembre 1449, le roi Charles VII vient en personne mettre le siège devant la forteresse et en reprend possession au bout de cinq semaines de siège.
Pendant les guerres de Religion, les troupes du roi Henri IV s’en emparent en 1591 après presque deux ans de siège. En 1598, les États généraux de Normandie demandent au roi la démolition de l’édifice afin d’éviter qu’une nouvelle bande armée s’y retranche pour piller la région et Henri IV l’accepte.
En 1603, les capucins du Grand-Andely sont autorisés à prendre des pierres pour la réparation de leur couvent, autorisation donnée également sept ans plus tard aux pénitents de Saint-François du Petit-Andely, puis ceux de Rouen. Les deux communautés religieuses s’attaquent en priorité aux courtines de la basse-cour et de l’ouvrage avancé. La destruction est interrompue en 1611 puis reprise sous l’égide de Richelieu. Le cardinal ordonne l’arasement du donjon et de l’enceinte de la haute-cour.
En 1862, Château-Gaillard est classé au titre des monuments historiques. Il entre dans les guides touristiques vantant les ruines romantiques de la Normandie. En 1885-1886, l’architecte Gabriel Malençon, puis vers 1900, l’archéologue Léon Coutil, sont chargés de dessiner un relevé des vestiges. Plusieurs fouilles et sondages ont permis de mieux connaître le château. Si son plan est maintenant bien connu, il reste des incertitudes sur son histoire et sur l’origine de certains perfectionnements architecturaux.
Nous comprenons ainsi mieux l’aspect en ruine de ce Château qui a traversé plusieurs siècles de conquêtes, de guerres, de transformations et de destructions durant huit siècles. La montée vers ce monument historique est incontournable tant pour sa découverte historique que pour sa vue imprenable sur la commune Les Andelys et la boucle de la Seine qui la borde.
Nos calories envolées par l’activité sportives en montée, la visite sur site et son retour pédestre vers nos bolides c’est avec la gorge un peu sèche par la chaleur du soleil normand que nos chevaliers descendent le petit chemin pour rejoindre leurs chevauchées et pouvoir aller faire bonne ripaille et s’hydrater au restaurant « American Grill ».
Deux grandes tablées les attendent en ce restaurant traditionnel américain situé dans un centre équestre en bordure de la forêt de Lyons agrémenté d’un cadre atypique, de terrasses dans un calme absolu. La décoration intérieure est marquée et l’ambiance conviviale idéale pour les nos amoureux des US avec une cuisine maison très appréciée : hamburgers, smoked food, desserts maison, waffles, pancakes et milk shakes…Ce n’est qu’après la petite pause digestive en terrasse que nos bikers regagnent leur domiciles respectifs.
Merci JP pour cette belle découverte d’un jour et félicitation pour son organisation au top comme de coutume.
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